En 1997, le Parlement Wallon a voté un décret fixant les règles de subventionnement des services d’accueil de jour comme de nuit pour les personnes adultes handicapées mentales. Ces règles permettaient la réalisation d’un accueil de qualité, mais le décret était assorti d’un moratoire : budget oblige, de nouvelles places ne pouvaient plus être subventionnées.

Un besoin évident de nouvelles places se faisant sentir, quelques familles d’irréductibles ont décidé de créer elles mêmes un service. Elles ont commencé par formuler un projet pédagogique qui cumulait deux avantages. Le premier était de réduire les coûts d’encadrement en chargeant les habitants eux-mêmes d’un certain nombre de tâches ménagères (dans les limites de leurs capacités). Le deuxième avantage était que, simultanément, les habitants de la maison communautaire rêvée étaient acteurs de leur propre vie et non consommateurs de services, ce qui les valorisait.

Ce projet pédagogique repose sur trois concepts qui sont à la fois fins et moyens et qui interagissent finement entre eux. L’initiale de ces trois concepts a donné le nom au projet : A pour Autonomie, I pour Intégration et R pour Réseau.

Mais pour que ce rêve devienne réalité, il fallait trouver un lieu d’implantation. À la recherche de locaux à aménager, nous avons reçu des propositions de nous installer à la campagne. Mais, pour nous, cela aurait ajouté des obstacles à la réalisation du projet. C’est en ville que nous devions nous implanter. Et nous avons eu la chance de pouvoir signer un bail emphytéotique pour occuper (quasi gratuitement) le troisième étage du Home St Jean Berghmans sur le Campus de l’Institut Gramme (quai du Condroz) et donc à 300 mètres du pont de Fragnée et à 150 mètres de Belle Ile.

Après neuf mois de travaux d’aménagement importants, les 5 premiers habitants se sont installés le 10 septembre 2001. Ils sont aujourd’hui 15 et vous invitent au 8° anniversaire de l’ouverture à l’occasion d’une brocante et d’une journée portes ouvertes le dimanche 13 septembre toute la journée.

Ce sera pour nous l’occasion d’expliquer concrètement pourquoi ce projet se devait d’être urbain, ce qui a assuré indéniablement sa réussite. Quelques exemples. Quand on parle d’autonomie, il y a bien sûr les actes de la vie quotidienne dont nous parlions plus haut, mais il y a aussi l’autonomie dans les déplacements. Une installation à la campagne aurait nécessité impérativement un minibus pour tout le monde, tandis qu’implanté en ville près d’un bon nœud de lignes de bus, plusieurs habitants ont pu acquérir une autonomie suffisante pour se déplacer vers leur centre de jour. Quand on parle d’intégration, on pense par exemple à ces déplacements individuels en bus, mais aussi à ces petites activités de loisirs où des bénévoles viennent chercher un groupe d’habitants pour se rendre à la foire, au cinéma ou manger une glace sur une terrasse ; la proximité rend ainsi bien des choses possibles et désirables comme également les achats faits par certains en toute autonomie à Belle Ile, le personnel de la grande surface ayant été associé à un accueil spécifique. Enfin, le réseau de bénévoles nécessaire pour pallier à l’absence de subvention récurrente se recrute aussi plus facilement dans une ville où les déplacements sont moins conséquents : papy’s bricoleurs, mamy’s cuisinières et bénévoles d’encadrement sont facilement sur place.

Il y a bien entendu encore des améliorations à apporter et nous pensons que nous pouvons compter sur tous ceux qui, en ville, peuvent être attentifs à une personne atteinte d’un handicap mental et qui leur semblerait en besoin d’aide ou d’accompagnement. Notre vœu est en tout cas d’associer les efforts de tout un chacun. Ce serait le plein sens d’une ville vraiment humaine.