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Une publication de l'asbl urbAgora

Le chaînon manquant

Un journal en ligne sur les questions urbaines à Liège

Prospective

Faire disparaître la piste de ski

Une nouvelle rubrique pour proposer des projets « fous », des idées qui sortent du cadre. L’objectif n’est pas tant que prétendre que tout est possible, en tout cas à court terme, que de se forcer à imaginer la ville autrement, de briser certains carcans qui entravent notre façon de considérer l’espace urbain. Premier papier, sous la plume d’Antoine Faja : et si on enterrait le viaduc de l’A602 ?

3 septembre 2009 - par Antoine Faja

Le constat s’impose : le viaduc de l’autoroute A602 — que le peuple de Liège baptisa jadis, à l’époque il se terminait dans le vide à la manière d’un tremplin, la « piste de ski » —, entre Burenville et l’entrée du tunnel de Cointe est une nuisance majeure. Paysagère : ce stigmate de l’ère automobile est omniprésent dans le paysage, au point d’être devenu un temps un symbole négatif de la ville. Urbaine : le viaduc opère une véritable coupure dans la ville et consomme un espace considérable, très précieux, qui pourrait être beaucoup mieux utilisé, par exemple pour densifier la ville. Environnementale : le bruit et la pollution atmosphérique générés par l’autoroute pèsent lourdement sur la qualité de vie de ses milliers de riverains.

Constat subsidiaire : la présence de ce viaduc empêche pratiquement la mise à quatre voies de la ligne de chemin de fer entre les Guillemins et Ans. Or cette ligne, empruntée par les trains desservant Bruxelles, y compris les TGV, est la plus fréquentée du réseau liégeois, au point d’être aujourd’hui sous-dimensionnée : dans son gabarit actuel, elle ne permet quasiment plus d’augmentation de capacité, a fortiori une exploitation de type RER — que pourtant on souhaite par ailleurs développer — semble impossible en l’état actuel des choses.

Les Liégeois ont semble-t-il résolu de s’accomoder de cette situation comme d’un mal nécessaire. Et si tel n’était pas le cas ?

Notre hypothèse : il est possible de prolonger le tunnel de Cointe jusqu’à Burenville (longueur : environ 2,5 km). Ce tunnel en tranchée couverte passerait donc sous l’avenue de l’observatoire, le long de la rue des Eburons et de la rue Louis Boumal, sous les rues Saint-Gilles, Saint-Laurent et suivantes. On supprimerait en outre les sorties d’autoroute Saint-Laurent et Laveu qui inondent de voitures des quartiers résidentiels (les actuelles sorties de Burenville, d’Avroy et des Guillemins sont maintenues et améliorées, en les branchant directement sur le tunnel). Ce faisant, le rôle de l’autoroute serait modifié dans le sens d’une moindre desserte urbaine.

La création de ce tunnel (et la destruction consécutive du viaduc) permettra de faire passer la voie de chemin de fer entre les Guillemins et Ans à quatre voies. Ce qui permet la réouverture de la station des Hauts Prés ainsi que la création d’une station « Jaurès », à Ans, au croisement de la rue Jean Jaurès et du chemin de fer et une autre dans le bas du quartier du Laveu.

Sur la superficie ainsi dégagée, il serait possible de recréer un parcelaire dense, principalement composé de maisons familiales mitoyennes avec jardin. Les terrains situés entre les actuelles sorties de Burenville et Saint-Laurent sont consacrés à la création d’un nouveau quartier (à proximité d’un futur arrêt de tram). Tous ces nouveaux espaces sont agrémentés d’espaces publics, notamment une place publique faisant lien entre le bas du Laveu et les quartier du Botanique et Sainte-Véronique, éventuellement une place publique au carrefour des rues Saint-Laurent et du Calvaire,....

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Plan général de la zone
Il ne s’agit évidemment que d’une hypothèse montrant la possibilité de recoudre le tissu urbain. Les voiries existantes sont indiquées en jaune. Les voiries et places à créer en blanc. Les lignes rouges indiquent les fronts bâtis à créer ou à reconstituer. Le tunnel autoroutier est visible en filigrane.
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La situation actuelle
Vue aérienne de l’actuelle sortie d’autoroute « Avroy » (sur la gauche de l’image : le quartier Laveu, dans le fond le Jardin botanique, sur la droite le quartier Sainte-Véronique.
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Le même endroit sans autoroute
Un possible réaménagement de ces mêmes lieux : l’autoroute est passée en sous-sol (de même que la ligne de chemin de fer reliant les Guillemins à Jonfosse). Le chemin de fer allant vers Ans compte quatre voies au lieu de deux (ce qui permet le trafic combiné des TGV et d’une desserte locale). Une station RER est venue s’implanter entre les deux quartiers. Et une perspective arborée est née entre le pied de la rue des Wallons et la rue Sainte-Marie. Les nouveaux volumes envisagés sont colorés, les volumes existants sont en blanc. Il s’agit bien évidemment d’une esquisse extrêmement grossière qui ne prend pas en compte de nombreux éléments (en particulier la déclivité du terrain).
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Vue zénithale de la situation actuelle
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Vue zénithale avec l’autoroute enterrée
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Boston, avant et après le « Big Dig »

Question : est-ce réaliste ? Certainement pas. Est-ce finançable ? Encore moins. En tout cas pas à court-terme ni dans le contexte budgétaire et institutionnel actuel. Mais les choses peuvent changer. Pour preuve, un certain nombre d’exemples de villes ont choisi de réaliser des projets similaires. C’est par exemple le cas de la ville de Boston, qui a à présent achevé le projet « big dig » qui a vu l’enfouissement de voies rapides qui étaient jusque là suspendues et la création d’espaces verts en lieu et place.

Encore quelques vues...

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Perspective dans l’axe de l’avenue
Au premier plan, l’actuel front bâti de la rue Louvrex. Dans le fond, la station RER du Laveu.
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Vue générale
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Station de RER du Laveu
Détail de la station RER, située sur le très large pont ferroviaire qui enjambe la nouvelle place publique.

Les commentaires des internautes

4 messages

Faire disparaître la piste de ski
posté le 12 juillet 2010 par lolabalm@gmail.com

Merci pour l’info et bravo pour votre site, j’ai appris plein de choses.
Cigarette éléctronique


Faire disparaître la piste de ski
posté le 3 juin 2010 par Denis

Très bonne idée, mais il faudrait détailler les coûts d’une telle opération au-delà de la présentation architecturale, économique sociale et environnementale très juste afin d’être écouté soit par lé Région soit par les autorités européennes.

Si vous aviez existé il y a 40 ans, peut-être J-M Dehousse vous aurait écouté et repensé son projet vers la traversée de Cointe. Car je pense que vu notre situation budgétaire actuelle (22mls d euro à trouver d ici 2015) et vu le coût probable en dizaines de millions d’euro d’un tel projet, votre projet urbanistique ’réparateur’ risque de faire sourire au MET (pardon, SPW) ou, malheureusement, d’être placé dans le fond de la pile de dossiers.


Faire disparaître la piste de ski
posté le 4 janvier 2010 par Murielle

Quelle étude, je n’en reviens pas. Des propositions concrètes qui ont du demander beaucoup de temps et de réflexions. Je peux être qu’admirative du travail effectué.
carpe


Faire disparaître la piste de ski
posté le 24 novembre 2009 par Alain

Un joli rêve ? Ou mieux que cela ?

Je mets juste un bémol en ce qui concerne les accès. En effet,tous les liégeois, et ce y compris ceux du Laveu, ne travaillent pas en ville, et ne sont pas nécessairement intéressés par la disparition de leur accès à l’autoroute. En limitant les pénétrantes, on limite aussi... les sortantes. Ce superbe projet aura sa place le jour d’une vraie analyse globale du transport. En revanche, cette réflexion a l’énorme mérite de souligner la possibilité de porter la réflexion au delà de ce qui parait concevable.


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