En matière de mobilité, il n’existe pas de solution-miracle et on ne saurait aujourd’hui penser l’organisation des déplacements dans une grande ville autrement qu’en combinant plusieurs modes de transports entre eux. Le tram, par conséquent, n’est en fait que la partie la plus visible d’un débat beaucoup plus large : celle du transport en commun dans l’ensemble de la zone urbaine liégeoise, en ce compris de nombreuses communes qui ne sont pas, à ce jour, directement concernées par l’implantation d’une ligne de tram.
Quand on parle du « tram » de Liège, on parle donc surtout de la nécessaire réorganisation du réseau de transport en commun et de la mise en place d’axes dits structurants — c’est-à-dire présentant un niveau de service (vitesse, régularité, fréquence,...) et une capacité (le nombre de voyageurs pouvant être transportés) supérieurs à ce qui existe aujourd’hui.
Mais pourquoi choisir le tram ? D’autres modes de transport ne peuvent-ils pas jouer le même rôle à moindre coûts ou de façon plus efficace ?
Pourquoi le bus ne suffit-il pas ?
Comme le savent tous les usagers matinaux du réseau liégeois des TEC, sur certains tronçons, dont la longueur augmente chaque année, le bus est arrivé à saturation : la technologie en place n’est tout simplement plus à même de répondre à une demande en constante augmentation. Et ce n’est pas l’injection dans le réseau de nouveaux bus qui va suffire à résoudre le problème. Le tram — dont la capacité est nettement supérieure à celle du bus — constitue une solution à ce problème.
On signalera qu’il existe une version « améliorée » du bus, le Bus à haut niveau de service ou « BHNS ». Ce BHNS propose une qualité de service proche de celui du tram (rapidité, facilité d’embarquement,...). Il ne résout cependant pas le problème de la capacité.

Pourquoi pas le bateau ?
Certaines voix se sont fait entendre depuis fort longtemps pour faire remarquer que la principale voie de communication liégeoise — la Meuse — était fort peu utilisée. Et, effectivement, dans certaines villes (notamment des villes portuaires), le bateau est parfois utilisé comme mode de transport en commun.
Il semble cependant que les obstacles soient de taille : les exemples existants ou les quelques propositions chiffrées dont on dispose montrent en effet que le coût d’un tel mode de transport est très important, que sa capacité est insuffisante à lui permettre de jouer le rôle d’axe structurant que l’on recherche, que la vitesse dite « commerciale » (c’est-à-dire la vitesse moyenne, en incluant le temps au arrêts) est fort peu élevée.
Bref, le bateau est sans doute un outil intéressant (notamment sur le plan touristique), mais il ne constitue pas la solution de grande capacité dont on a besoin à Liège [1].
Pourquoi pas le train ?
L’agglomération liégeoise dispose d’un réseau ferré remarquable, très étendu et dont la plupart des lignes sont loin de la saturation : il est donc possible de l’utiliser plus intensivement pour le transport des personnes. Face à la constat, d’aucuns estiment que la — coûteuse — installation d’un tram ne se justifie à Liège.
Ce point de vue doit être nuancé :
— Le réseau de chemin de fer ne passe pas nécessairement là où la demande de mobilité est la plus forte (au cœur des quartiers, dans les rues commerçantes, à proximité des écoles,...). On observe en effet que devoir marcher 500 mètres ou plus pour atteindre la première station est rédhibitoire dans le chef d’une grande partie des usagers des transports en commun.
— L’exploitation ferroviaire n’est pas adaptée à des arrêts fréquents : ses performances diminuent fortement si on le fait s’arrêter trop fréquemment — et ces arrêts multiples ne sont pas nécessairement compatibles avec la présence de trains s’arrêtant moins souvent sur les mêmes voies. Il est donc difficile de faire jouer au train le rôle de desserte fine des quartiers pour lequel le tram est par contre taillé.
Bref, le train a un rôle à jouer, mais ce rôle est probablement plutôt à chercher dans des déplacements de plus longue distance. Et ce rôle est manifestement complémentaire à celui que peut jouer le tram.
Pourquoi pas le métro ?
Le métro est tout simplement impayable, aussi bien en ce qui concerne la construction qu’en ce qui concerne son exploitation. L’agglomération liégeoise est en outre beaucoup trop peu dense que pour justifier un mode de transport d’aussi grande capacité que le métro.
Et pourquoi pas la voiture ?
Chacun peut s’en rendre compte : l’accroissement permanent du trafic automobile fini par rendre celui-ci de plus en plus... immobile.
Les conséquences négatives du tout-à-la-voiture sont extrêmement importantes sur la qualité de vie en ville — notamment parce que la plus grande partie de l’espace public est consacrée à la circulation et au stationnement des voitures — ainsi que sur la santé des habitants et usagers de la ville, qui subissent continuellement le bruit, la pollution et les risques d’accident.
De surcroît, des phénomènes globaux nous obligent à nous passer de plus en plus de la voiture. Le bouleversement du climat sous l’effet de l’activité humaine nous impose de cesser presque complètement, d’ici quelques dizaines d’années à peine, d’émettre des gaz à effet de serre. L’épuisement des ressources pétrolières de la planète pose la question de l’alimentation énergétique. Dans une société post-carbone, sera-t-il encore possible de trouver suffisamment d’énergie pour faire rouler des millions de voiture ? C’est peu probable. Il est par conséquent indispensable de mettre dès à présent en place des alternatives — avec d’autant plus de volonté que Liège a accumulé en la matière un retard important sur la plupart des autres grandes villes occidentales.